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Versus #5 : "Le retour de Martin Guerre" (1982) contre "Sommersby" (1993).

Par Valmont (Lovenaute)
Par Valmont (Lovenaute)

Pour ce cinquième numéro de Versus, j’établis la comparaison entre deux adaptations d’une histoire d’usurpation d'identité d'après le roman de Natalie Zemon Davis, "The Return of Martin Guerre". Cette auteure anglaise s’est elle-même inspiré d’un fait divers français datant de 1542 paru dans l’ouvrage d’un célèbre juriste toulousain, Jean de Coras. Ce dernier relate des faits qu’il qualifie d’ "histoire prodigieuse de nostre temps". Si vous voulez en savoir plus sur les vrais protagonistes, rendez-vous ici.

Les affiches.

Les affiches sont très intéressantes à décrypter. La version française met en valeur le travail de la terre et la vie quotidienne paysanne au XVIe siècle. On y distingue des scènes marquantes du film comme le rassemblement provoqué par le retour de Martin mais aussi des travaux des champs. Les tons terreux de l’ensemble (brique, ocre, sépia) tendent à insister sur ce côté paysan et France profonde, faite de labeur et de difficulté. J’aime beaucoup l’allusion aux triptyques religieux qu’on trouvait à l’époque. L’ensemble fait penser à la peinture flamande (voir Triptyque de la Déploration, 1511, Quentin Metsys). Les personnages apparaissent au 2/3 de l’affiche, dans les mêmes nuances que le fond. On peut voir uniquement leurs visages préoccupés, nerveux et inquiets. Martin est placé de telle sorte qu’il protège Bertrande, elle-même derrière lui dans une attitude de totale confiance. Ils regardent tous deux dans la même direction, voulant ainsi exprimer qu’ils sont sur la même longueur d’ondes et sont tendus vers le même but : convaincre leurs détracteurs. Le titre est écrit en haut, comme une blancheur lumineuse, mis en valeur grâce au contraste provoqué par le brun de l’arrière-plan.

 

Dans l’affiche américaine, on a préféré se recentrer sur le sujet. L’accent est mis sur les personnages principaux qui occupent une grande partie de l’affiche et l’on n’a aucune référence quant au lieu extérieur. L’arrière-plan, qu’on devine être une pièce, est plongé dans la pénombre, la lumière venant de la lampe tenue par Jack. Cette fois, on insiste sur la relation entre les époux. Lui a la tête penchée, presque timide et sourit légèrement. Il prend la main de sa femme, dans un geste d’une extrême douceur. Laurel est de profil, entièrement tournée vers lui, manifestant ainsi le profond attachement qu’il lui inspire en lui prodiguant une caresse. L’opposition venant de leurs vêtements est bien pensée : la jupe blanche de Laurel appelle la chemise blanche de Jack. Pareil pour le haut et le pantalon. Là encore, ce parti-pris est emprunté aux techniques picturales. Cette règle de composition géométrique (appelé Art des Diagonales) est particulièrement visible ici. Elle aide à disposer les motifs et permet d’exprimer des sentiments (aggraver ou améliorer la situation), créer des tensions ou adoucir, selon le tableau (ou l’image).

 

Egalité

La musique.

Le compositeur Michel Portal a remporté un franc succès aux Césars de 1983 pour la bande originale du "Le Retour de Martin Guerre". Il nous propose une musique d’inspiration baroque folklorique. On y trouve des sonorités pleines à travers une mélodie simple. Cette recherche du naturel confère à l’ensemble un côté vivant et authentique. Les percussions, comme les grelots ou le cor, insiste sur le terroir et la simplicité, accompagnés de chants festifs rappelant les youyous du Maghreb.

Danny Elfman, quant à lui, est l’auteur de la BO de "Sommersby". Ex leader du groupe de rock new wave Oingo Boingo, il a composé la musique de la plupart des films de Tim Burton et de Blockbusters comme Batman ou Men in Black. Ici, il nous propose un ensemble de cordes et de vent très inspiré et lyrique. Elfman dit lui-même : "Muy romantico... But the kind of romance I love so dearly... Slow and dark, with a hero hung by the neck at the end... Joy!" En résumé, romantisme, lenteur et noirceur quand on sait la fin du héros. On y retrouve des thèmes chers au western, l’histoire se passant après la guerre de Sécession.

(Si vous regardez beaucoup de films, vous aurez noté qu'un extrait de la musique ci-dessus est utilisée pour le logo de la compagnie Regency, qui apparait au début de tous les films qu'elle produit.)

 

Avantage "Sommersby"

L'interprétation.

  • Le personnage principal :

C’est très difficile de départager deux des acteurs les plus talentueux de leur génération. Disons qu’elles sont très différentes l’une de l’autre. Gérard Depardieu joue un paysan authentique, spontané et sensible, plein de verve joyeuse parfois brutale. Toutefois, il met en exergue un côté déplaisant du personnage : sa cupidité. Ce trait de caractère, très bien joué par Depardieu nous le rend moins sympathique. Richard Gere lui, campe un personnage un peu timide voire réservé. Dans certaines scènes, il joue parfaitement l’homme qui manque de confiance en lui. C’est contradictoire avec le culot qu’il lui faudra pour usurper l’identité du vrai Sommersby. Il y a une certaine ambigüité de caractère. Il est très doux et tendre. Il chuchote souvent ses phrases ce qui rend l’intrigue très prenante et pleine d’émotion. Je préfère son interprétation.

 

  • L'héroïne principale :

Là aussi, deux actrices fabuleuses : alors que Nathalie Baye prend le parti de faire de Bertrande une femme effacée et peu loquace, Jodie Foster prend le contre pied de cette interprétation, rendant Laurel très forte et déterminée. L’une est timide et recherche la protection d’un mari, l’autre est une femme de tête qui découvre le véritable amour. Toutes deux jouent ces divers sentiments à travers une gamme de nuances subtiles et chacune est parfaite. La paysanne gauche du milieu du XVI e siècle ou la patronne d’une plantation après la guerre de Sécession. Je n’ai pas su choisir.

 

Pour résumer, le couple Foster / Gere m’a davantage convaincu par l’amour qu’il se porte. Il y a une sorte d’alchimie entre eux, qui rend leur relation authentique et sincère. Non pas que l’autre couple ne convainc pas, au contraire. Mais on a du mal à s’imaginer la fragile Nathalie Baye et le colossal Gérard Depardieu ensemble, tant le contraste est fort.

 

Léger avantage "Sommersby"

L'intrigue (Attention, spoilers !).

A peu de choses près, l’histoire est la même. Seules les époques et les lieux diffèrent. La version française se déroule non loin de Toulouse à deux moments différents. Une voix off commence le récit de cette troublante affaire. En 1542, dans le comté de Foix, se trouve un village, Martigatte. Un couple se marie. C’est Bertrande qui prend le relais et s’explique avec le conseiller du parlement de Toulouse Jean de Coras.

 

Elle commence par lui raconter son mariage avec Martin Guerre, un jeune homme choisit par ses parents. De façon très réaliste, on assiste à l’énumération de la dote, ce qui rend l’union placée sous l’égide de la raison. Martin n’est pas instruit et la première année de leur mariage, ils vivent dans une chaumière. Il a des problèmes sexuels et ne désire pas sa femme, créant des tensions au sein du couple. Les parents de Martin finissent par le faire désenvoûter par une sorcière, puis par le curé. Enfin, le mariage peut-être consommé. Bertrande aura un enfant. Suite à une forte dispute avec son père, Martin choisit de partir à la guerre contre l’Espagne compte tenu de la proximité géographique. Il restera absent 9 hivers durant lesquels le village le croira mort. La version américaine ne parle pas de ce passage.

 

  • Le retour

Dans la version française, Martin revient à pied et rencontre deux villageois qu’il reconnait sans problème. Puis, il rencontre sa femme qui le reconnait aussi. Dans la version US, on voit Sommersby terminer une sépulture à l’aide de pierres pour ensuite prendre la route à pieds et le passage est sensiblement le même. On découvre ainsi la plantation de Sommersby.

 

On note entre les deux versions un changement de classe sociale. Martin est un paysan plutôt aisé mais ce n’est rien en comparaison du domaine de Jack qui possède une plantation de coton et des esclaves. Toutefois, tous deux sont confrontés à des difficultés financières. La terre ne donne plus rien et Jack a entendu parler de plantation de tabac. C’est un vrai challenge pour les habitants du coin. Ils doivent lui faire confiance et lui donner toutes leurs économies pour qu’il achète des plants de tabac. Au bout de quelques semaines qui ont paru longues à tous, il revient avec le précieux sésame et la culture réussit.

 

Martin, quant à lui, veut s’agrandir et réclame à son oncle Pierre (joué par Maurice Barrier), le profit de 8000 livres qu’il aurait touché en s’occupant de ses terres durant son absence. L’oncle ne possède pas cette somme et la colère du neveu va provoquer les soupçons de son parent.

 

  • La relation entre les époux.

Bertrande se rend compte assez vite que Martin n’est pas comme avant. Il est différent sur bien des plans. Alors qu’il était brutal et peut-être même violent, il apparaît plus doux avec elle, aimant et même câlin. Il la protège et lui porte un véritable amour. Il revient de la guerre instruit, ce qui surprend tout le monde. Il apprend à écrire son prénom à Bertrande.

 

Laurel, surprise du retour de Jack, semble en même temps partagée. Durant l’absence de son mari, elle est courtisée par un homme, Orin Meecham (joué par Bill Pullman) qui souhaite l’épouser. Elle s’apprête à accepter. Le retour de Jack remet tout en cause et provoque la colère d’Orin. Cependant, Laurel refuse de se laisser courtiser. A l’opposé de l’original, le remake est explicite sur les relations autrefois violentes entre Laurel et Jack. La jeune femme est sur ses gardes mais, peu à peu, elle se laisse charmer par son mari.

 

  • Le procès.

A la suite de la dispute entre Martin et son oncle Pierre, ainsi que du témoignage de vagabonds, Jean de Coras est amené à éclaircir l’identité de Martin Guerre. Les témoins se suivent et se contredisent jusqu’à l’arrivée dans le tribunal du vrai Martin (joué par Bernard-Pierre Donnadieu).

 

Dans la version US, le réalisateur propose un postulat différent, à savoir que le véritable Sommersby est accusé de meurtre et rattrapé par la justice. Il aurait tué un homme et doit être pendu. Soit Jack campe sur ses positions et sera condamné, soit il dit la vérité mais décevra le village, son fils et ceux qui lui ont fait confiance.

 

Dans les deux versions, les femmes témoignent contre leur mari. Bertrande le fait pour obéir à son oncle, Laurel pour éviter à Jack la pendaison. La fin est la même pour les deux versions.

 

Egalité

 

Voilà pour ce 5ème numéro de Versus ! A vous de vous faire votre opinion en regardant les deux films (qui sont d'ailleurs très bons).

 

 

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